Créée en 2003 par Bartabas dans la Grande Écurie du Château, l’Académie équestre de Versailles est un corps de ballet unique au monde. Ce laboratoire du geste interroge depuis son ouverture l’enrichissement de l’art équestre par une pensée chorégraphique.
Fondé sur la transmission autant que sur l’art de la représentation, l’enseignement quotidien associe le dressage de Haute École à diverses disciplines telles l’escrime artistique, la danse, le chant ou le Kyudo – tir à l’arc traditionnel japonais. Les écuyères développent alors une véritable sensibilité artistique mise au service d’un répertoire très singulier, entièrement dédié au public.
Opus au long cours, le spectacle de répertoire La Voie de l’écuyère révèle ses valeurs de transmission, cette écoute si particulière, qui va bien au-delà de la simple communication verbale et se traduit par une harmonie et une connexion profonde entre les écuyères et leurs montures. La technique laisse place à l’émotion. Au son des compositions de Jean-Sébastien Bach, les différents tableaux – reprise d’escrime à cheval, ballet des sorayas aux longues rênes ou encore carrousel chanté – se succèdent au gré de citations de grands maîtres de l’art équestre, qui exaltent l’excellence du dressage de tradition française, tels qu’Oliveira, L’Hotte, Baucher ou Beudant.
« En créant l’Académie équestre de Versailles, j’ai voulu transmettre une philosophie, une énergie, un état d’esprit, et au-delà partager l’humilité et le doute face à la création. »
La Voie de l’écuyère célèbre et magnifie la dimension artistique de l’équitation, où l’écoute du cheval est au cœur de chaque instant.
« Je voulais créer une école ; une école d’un genre nouveau, une sorte de compagnie-école où s’inventerait une philosophie du “vivre ensemble”, une école où les chevaux nous apprendraient à travailler en harmonie, dans le respect de l’autre, une école en perpétuel mouvement, sans règles pré-écrites, sans cursus, sans diplôme. J’ai imaginé cette Académie comme une école de haut niveau, capable de former des cavaliers artistes, mais qui serait aussi un lieu l’épanouissement, un lieu où se façonnent de belles personnes. Je n’envisageais pas que l’acte de transmettre se résume à communiquer à d’autres sa technique ou son savoir-faire. Pour cela, et c’est la profonde originalité de l’Académie, chaque écuyer reçoit un enseignement complet basé sur la danse, l’escrime artistique, le chant, l’arc traditionnel japonais, en complément du travail à cheval. Yehudi Menuhin disait que pour le musicien “le violon, ça devient rapidement un problème de corps”, ce corps qu’il faut faire travailler autrement pour qu’il conserve ou retrouve sa souplesse, sa respiration. À cheval, c’est la même chose. C’est pourquoi il est capital d’aborder d’autres disciplines qui, chacune, “assouplissent” le corps et la tête de l’écuyer. L’apprentissage de toutes ces techniques n’a qu’une finalité : mieux appréhender le travail équestre en développant le ‘sentiment’ du cavalier. » Extrait du Manifeste pour la vie d’artiste de Bartabas.
Biographie de l’artiste
Écuyer d’exception, chorégraphe, metteur en scène, scénographe, réalisateur et écrivain, Bartabas a inventé une forme inédite de spectacle vivant : le Théâtre équestre, conjuguant art équestre, danse, musique et comédie.
En 1984, il fonde sa compagnie, le Théâtre équestre Zingaro, qui s’installe au Fort d’Aubervilliers en 1989. Ses créations Cabaret équestre, Opéra équestre, Chimère,Éclipse,Triptyk, Loungta, Battuta, Darshan, Calacas, On achève bien les anges (Élégies) et Ex Anima, sont à chaque fois des évènements qui marquent leur époque et triomphent partout de New York à Tokyo, d’Istanbul à Hong Kong, de Moscou à Mexico. Depuis 2021, la compagnie renoue avec ses origines et crée chaque hiver au Fort d’Aubervilliers un nouvel opus des Cabaret de l’exil.
En état de recherche perpétuelle, Bartabas présente régulièrement des œuvres plus intimistes dont il est tout à la fois l’auteur et l’interprète, comme Entr’aperçu (2004), Le Centaure et l’Animal (2010) créé en compagnie du danseur de Butô Ko Murobushi, ou Golgota (2013) avec le danseur de flamenco Andrés Marin.
Soucieux d’une transmission artistique, il fonde en 2003 l’Académie Equestre de Versailles, un corps de ballet sans autre exemple au monde, qui se produit dans le manège de la grande Écurie royale et pour lequel il signe de nombreux spectacles chorégraphiques. Ce laboratoire du geste interroge depuis son ouverture l’enrichissement de l’art équestre par une pensée chorégraphique.
Pour le cinéma, Bartabas a réalisé Mazeppa (1993), Chamane (1995), Galop arrière (2010), et Les chevaux voyageurs (2019).
Bartabas a signé Manifeste pour la vie d’artiste en 2012 (Éditions Autrement), D’un cheval l’autre (Éditions Gallimard, Collection Blanche 2020, Folio 2021), Les cantiques du corbeau (Éditions Gallimard, mars 2022) et Un geste vers le bas (Éditions Gallimard, mars 2024).
« Il est toujours difficile, voire un peu illusoire, de prétendre déterminer comment ça acommencé, de déterminer l’événement fondateur d’une vie d’artiste, le premier choc émotionnel. Pourquoi suis-je devenu artiste, et cet artiste-là ? Inventer une forme de spectacle comme la nôtre, un théâtre équestre, suppose d’abord d’accepter la vie nomade, ses libertés et ses contraintes, la liberté qui en est l’essence mais aussi l’inconfort. Aussi, à peine a-t-on parlé de «choisir» cette vie, qu’il faut se poser la question : est-ce un choix si délibéré ? Car on choisit une vie d’artiste avant d’être artiste.
Je naîtrai artiste un peu plus tard, lorsque je commencerai à travailler le matériau que je me suis choisi. Car c’est le rapport que l’artiste entretient avec son matériau qui le fait naître; c’est la façon dont il saura jouer avec les contraintes que le matériau lui dicte qui fera de lui un artiste »
Bartabas – Manifeste pour la vie d’artiste, Editions Autrement, 2012.